Marie Archange dite Julie Daigneau
Sept mois après son mariage, Archange donne naissance à sa première fille, Marie Elmire. Là encore, le premier enfant arrivait souvent plus vite que les suivants. Elle n’est pas la première femme à se marier enceinte. Trois autres filles naîtront à deux ans d’intervalle chacune: Marie Archange dite Angèle, Henriette et Caroline. La dernière naît en juin 1828, sept ans après le mariage de ses parents. Celle-ci décède cinq jours après sa naissance. Puis, la pénultième décède en décembre 1829. Enfin, Jean Detouin meurt en 1832 lors de l’épidémie de choléra. Les deux aînées se retrouvent orphelines de père et sont prises en charge par un oncle. Mais où est donc leur mère?
Archives judiciaires et registre d'écrou
La déposition de Jean Detouin contre sa femme, le 5 mai 1831, nous éclaire un peu sur la situation de la famille et, par ricochet, sur celle d’autres familles de Montréal à l’époque: «… depuis environ trois années, Julie Daigneau sa femme aurait laissé son lit et sa maison et abandonné ses enfants et serait adonnée à la boisson, vivrait errante et comme une vagabonde et une prostituée. Que depuis mardi dernier qu’elle serait sortie de prison, elle serait venue plusieurs fois trouver le déposant chez lui et plus particulièrement ce jourd’hui, aurait troublé la paix et la tranquillité publique, aurait assailli et menacé de frapper le déposant et aurait fait plusieurs menaces entr’autres qu’elle voulait faire bruler la maison …»
À y regarder de plus près, Archange est en pays de connaissance en prison. Elle y retrouve la marraine de sa benjamine, Angélique Catafard, qui est également entrée en prison à plusieurs reprises. Celle-ci est entre autres arrêtée sur le Champ-de-Mars, en compagnie d’autres prostituées, par un constable de police qui les décrit comme vagabondes et femmes de mauvaise réputation.
Archange dite Julie Daigneau sera emprisonnée 28 fois et décèdera en prison le 3 février 1837. Elle aura laissé toutes ces traces dans les archives judiciaires. Si je m’étais contentée de consulter les registres d’État civil, d’une part, je n’aurais jamais pu trouver son décès. D’autre part, je n’aurais jamais pu prendre toute la mesure de cette vie de misère qu’a connue cette famille. Enfin, à la lumière de ce portrait, il est légitime de se demander si Jean Detouin est le père des quatre filles d’Archange « Julie » Daigneau.
Suggestion de lecture:
Pilarczyk, Ian C. Justice in the Premises: Family Violence and the Law in Montreal, 1825-1850.
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